jeudi, 30 mars 2006
Adieu de francis Carco
Cabaret "Le Lapin Agile"
Adieu Si l'humble cabaret , noirci Par la pluie et le vent d'automne , M'accueille , tu n'es plus ici . . . Je souffre et l'amour m'abandonne . Je souffre affreusement . Le jour Où tu partis , J'appris a rire , J'ai depuis pleuré , sans l'amour , Et vécu tristement ma vie . Au moins , garde le souvenir , Garde mon cœur , berce ma peine ! Chéris cette tendresse ancienne Qui voulut , blessée , en finir . Je rirai contre une autre épaule , D'autre baisers me suffiront , Je les marquerai de mes dents . Mais tu resteras la plus belle . . . Francis Carco
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mercredi, 29 mars 2006
Hélène
Que tu es belle maintenant que tu n'es plus
La poussière de la mort t'as déshabillée même de l'âme
Que tu es convoitée depuis que nous avons disparu
Les ondes les ondes remplissent le coeur du désert
La plus pâle des femmes
Il fait beau sur les crêtes d'eau de cette terre
Du paysage mort de faim
Qui borde la ville d'hier les malentendus
Il fait beau sur les cirques verts inattendus
Transformés en églises
Il fait beau sur le plateau désastreux nu et retourné
Parce que tu es si morte
Répandant des soleils par les traces de tes yeux
Et les ombres des grands arbres enracinés
Dans ta terrible Chevelure celle qui me faisait délirer.
Pierre Jean Jouve
20:50 Publié dans Poètes du monde entier | Lien permanent | Commentaires (0)
ROBERT DESNOS
Je chante ce soir non ce que nous devons combattre
Mais ce que nous devons défendre.
Les plaisir de la vie.
Le vin qu'on boit avec les camarades.
L'amour.
Le feu en hiver.
La rivière fraîche en été.
La viande et le pain de chaque repas.
Le refrain que l'on chante en marchant sur la route.
Le lit où l'on dort.
Le sommeil, sans réveils en sursaut, sans angoisse du lendemain.
Le loisir.
La liberté de changer de ciel.
Le sentiment de la dignité et beaucoup d'autres choses
Dont on refuse la possession aux hommes.
Robert DESNOS
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dimanche, 26 mars 2006
Adieu l'ami
Je marche dans les rues, des braises plein les mains
Le museau de l'hiver, bien au chaud dans mes poches
Mon cœur un peu transi a pris froid au soleil
Je sais que le printemps y remettra bon ordre
Il me faudra du temps pour oublier la mort.
Elle a fauché plein fouet un de mes amis chers.
On avait beaucoup ri , dans la roue d'un manège,
En prenant des photos, dans les airs et le froid.
Mes larmes sont taries et je serre les dents,
Je ne suis qu'une impasse, inquiète dans le noir,
Cherchant toujours l'ami, souffrant et las de vivre
Qui a mangé du chanvre, au lever d'un jour sombre.
Cet horrible matin, que pouvions-nous pour toi ?
As-tu connu la peur, sur ce nouveau manège ?
Nous étions pourtant là, pour t'aider, te parler.
Mais tu as préféré partir, seul, sans paroles.
Tu nous laisse groggy et nous t'aimons très fort.
Malgré notre chagrin, va, continue ta route.
Des êtres tant aimés vont te prendre la main.
La Lumière t'attend, au bout de ton chemin.
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mercredi, 22 mars 2006
Alain Borne
La main touche une jupe
La main touche une jupe,
muguets fanés, je me souviens,
tiède comme un début de peau,
un feu de sang brûle les os.
Les joncs craquent sous le corps souple,
et le miel bout dans l'œillet pourpre,
sur le brasier de myosotis
là-haut où les oiseaux s'étirent.
Carrière de braise rouge,
près d'une eau non doublée de tain
où toute pudeur expire
au vent venu de Si loin,
Sous août bruissant, la fièvre est fraîche,
et la brûlure encore glacée
des lèvres fanées de soif,
et du corps torride de sang.
Voici la baie de tes jambes,
avant cette île foudroyée
où peut-être un peu de neige
attend ma tête sans pensée.
Terre de l'Été (Robert Laffont, 1945)
Alain Borne (1915-1962)
http://www.ac-grenoble.fr/lycee/LAB/qui_a_borne/qui_est_a_borne.htm
http://www.espritsnomades.com/sitelitterature/bornealain....
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lundi, 20 mars 2006
C'est le printemps !
Dans l’automobile écarlate
Se trémoussent deux amoureux
Il a les joues rouge tomate
Elle a le regard langoureux
C’est le cinéma de grand-père
Avec le relief, la couleur
Voici le son oh bonne mère !
Un coup de klaxonne en plein cœur
Toute la nature bourgeonne
Les oiseaux flûtent le printemps
Le dieu Priape s’époumone
Sur les braises de ses vingt ans.
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vendredi, 17 mars 2006
Un village et deux enterrements
Un village et deux enterrements
Il fait plus noir qu'au fond d'un puits.
Il fait plus noir que du charbon.
L'église au loin sonne le glas,
Pour un inconnu du village.
Il y aura beaucoup de monde.
Les gens aiment les respectables.
Ils ont pouvoir sur les vivants.
Le potard guette l'ordonnance
Et le médecin le malade.
Le gros boucher le bon vivant.
Le charcutier, le gros cochon.
Le coiffeur guette les hirsutes
Les deux cafés les croque-morts.
Et le curé son goupillon,
Son requiem de tradition.
Le p'tit village tout entier
A pris une tête d'enterrement.
Le cimetière est en beauté
Pour y loger cet inconnu.
Il y aura beaucoup de monde.
Les gens aiment les respectables,
Ils ont pouvoir sur les vivants.
L'église au loin sonne le glas.
C'est la fin de l'enterrement.
Le p'tit village tout entier
Reprend sa tête de tous les jours,
Sa tête de bon vivant.
Demain les cloches sonneront,
A pleines volées dans le ciel,
Pour des mariés très inconnus.
Il y aura beaucoup de monde.
Les gens aiment les respectables,
Ils ont pouvoir sur les vivants.
Le p'tit village tout entier
Aura la tête en tourbillon.
Les deux cafés seront ouverts,
Pour un tout autre enterrement :
Celui d'une vie de garçon !
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mercredi, 15 mars 2006
Je te salue, ô merveillette fente -Pierre de Ronsard (1524 - 1585)
Je te salue, ô merveillette fente,
Qui vivement entre ces flancs reluis;Je te salue, ô bienheureux pertuis,
Qui rend ma vie heureusement contente!
C'est toi qui fais que plus ne me tourmente
L'archer volant qui causait mes ennuis;
T'ayant tenu seulement quatre nuits
Je sens sa force en moi déjà plus lente.
Ô petit trou, trou mignard, trou velu,
D'un poil folet mollement crespelu,
Qui à ton gré domptes les plus rebelles:
Tous vers galans devraient, pour t'honorer,
A beaux genoux te venir adorer,
Tenant au poing leurs flambantes chandelles!
Pierre de Ronsard (1524 - 1585)
21:50 Publié dans Poèmes érotiques | Lien permanent | Commentaires (1)
Charles Cros
Sidonie a plus d'un amant,
C'est une chose bien connue
Qu'elle avoue, elle, fièrement.
Sidonie a plus d'un amant
Parce que, pour elle, être nue
Est son plus charmant vêtement.
C'est une chose bien connue,
Sidonie a plus d'un amant.
Elle en prend à ses cheveux blonds
Comme, à sa toile, l'araignée
Prend les mouches et les frelons.
Elle en prend à ses cheveux blonds.
Vers sa prunelle ensoleillée
Ils volent, pauvres papillons.
Comme, à sa toile, l'araignée
Elle en prend à ses cheveux blonds.
Elle en attrape avec les dents
Quand le rire entr'ouvre sa bouche
Et dévore les imprudents.
Elle en attrape avec les dents.
Sa bouche, quand elle se couche,
Reste rose et ses dents dedans.
Quand le rire entr'ouvre sa bouche
Elle en attrape avec les dents.
Elle les mène par le nez,
Comme fait, dit-on, le crotale
Des oiseaux qu'il a fascinés.
Elle les mène par le nez.
Quand dans une moue elle étale
Sa langue à leurs yeux étonnés,
Comme fait, dit-on, le crotale
Elle les mène par le nez.
Sidonie a plus d'un amant,
Qu'on le lui reproche ou l'en loue
Elle s'en moque également.
Sidonie a plus d'un amant.
Aussi, jusqu'à ce qu'on la cloue
Au sapin de l'enterrement,
Qu'on le lui reproche ou l'en loue,
Sidoine aura plus d'un amant.
Charles Cros
21:15 Publié dans Poèmes érotiques | Lien permanent | Commentaires (1)
samedi, 11 mars 2006
Gabriel Cousin
Ses doigts tronçonnés par la scie
montrent le bonheur
Vieux front scalpé à la perceuse
il pense à la justice
Jambe coupée aux roues de wagons
il marche au rang de la Paix
L'œil brûlé par un copeau chauffé au rouge
regarde l'avenir
Son bras arraché par l'hélice d'avion
lutte pour la liberté
Sa gorge lacérée aux cuves des acides
chante l'amour des choses
Ses poumons décomposés à la gueule du four
respirent la joie du monde
Le visage défiguré par un coup de grisou
il est beau comme un premier Mai
Gabriel Cousin
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vendredi, 10 mars 2006
Poème de Saint Ephrem
Celui qui lit ce poème d'Ephrem croira lire un écrivain de notre temps. Ces observations et critiques pertinentes notées il y a plus de mille six cents années, témoignent d'un véritable génie. Voici ce poème traduit de l'araméen, langue de l'auteur ; elle fut la langue du Christ, de sa mère et de ses apôtres. Elle est parlée jusqu'à nos jours dans certaines régions de la Syrie, de l'Iraq et de la Turquie. Elle est la langue des prières orthodoxes.
Poème de Saint Ephrem
Sur le jugement des hommes
Si quelqu'un s'adonne à des livres et des lectures, ils diront de lui un homme livresque et de littérature !
S'il cherche la science avec assiduité, ils diront de lui un fureteur de secrets.
S'il est actif et dynamique, il sera attaqué par la jalousie et la malice.
Si c'est lui qui porte la responsabilité, il sera la cible de leurs flèches.
S'il est simple et humble, ils le jugerons ignorant et naïf.
S'il est ardent dans quelque désir, ils diront de lui un homme obstiné et dangereux.
S'il se montre indulgent et patient, ils diront qu'il est imbécile et stupide.
S'il aime fréquenter quelqu'un, ils l'appelleront libertin et dévergondé.
S'il ne fréquente personne, c'est un misanthrope et qu'il a la société en dégoût
S'il est frugal et qu'il jeûne, il est fourbe et hypocrite.
S'il soigne sa table et manifeste son plaisir, c'est un gourmand et un viveur.
S'il s'abstient de manger, c'est un difficile et orgueilleux.
Bienheureux est celui qui s'éloigne du monde et de ses malices.
Bienheureux est celui qui considère ses défauts et ses fautes, et s'assied pour pleurer sa vie.
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mercredi, 08 mars 2006
Amour de neige
Ce matin, le soleil est comme un œuf crevé
Qui couve sous la cendre, au bas de l'horizon.
Des crinières de givre encerclent tous les arbres.
Sur les chemins bouclés, on casse du cristal.
On ratisse les toits, on écroule les tuiles.
Les couteaux de la nuit taillent dans le silex.
Tu es à la fenêtre, Ô mon amour de neige !
Tes cheveux d'or croulant, sur tes épaules nues.
Tu regardes le jour qui se lève avec peine.
Tu me demandes l'heure et puis tu te recouches.
Est-ce les derniers froids et les dernières neiges ?
Blottie entre mes bras, tu décides d'attendre
Que le soleil allume un gros bouquet de roses.
09:50 Publié dans Poésies sur l'amour, les femmes.. | Lien permanent | Commentaires (3)
dimanche, 05 mars 2006
Graine d'assassin
Il tague son cœur, son front et ses mains
Du mot HAINE.
Même le soleil ne peut le regarder en face.
Il est trop noir,
Ses yeux trop sombres.
Il a du sang sur les mains.
Pour lui les miroirs ont perdu leur tain.
Il est trop noir
Bien trop vilain
Il a une sale gueule d'assassin
Il ne met pas la pitié dans son vin
Il le boit pur
Pour mieux cracher son venin.
Des hommes cagoulés l'ont menotté
Et jeté en prison.
Il ne mérite même pas la pendaison.
Les jurés lui donneront la perpette…
Et dans vingt ans,
Pour bonne conduite,
S'il est toujours en vie,
Il retrouvera le soleil,
Les mains propres, blanchies.
Toujours noir,
Mais couvert d'oubli.
Les gens diront : "Qu'avait-il donc fait ?
Son nom ne nous dit rien".
Et ils s'en retourneront tranquilles
S'occuper d'un autre assassin,
Celui-ci bien au quotidien.
De la vraie graine d'assassin.
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vendredi, 03 mars 2006
Guillaume Apollinaire
Reconnais-toi
Cette adorable personne c'est toi
Sous le grand chapeau canotier
Oeil
Nez
La bouche
Voici l'ovale de ta figure
Ton cou exquis
Voici enfin l'imparfaite image de ton buste adoré
vu comme à travers un nuage
Un peu plus bas c'est ton coeur qui bat
Guillaume Apollinaire,
calligramme, extrait du poème du 9 février 1915, (poèmes à Lou).
19:05 Publié dans Poètes du monde entier | Lien permanent | Commentaires (0)