dimanche, 29 octobre 2006
Doux frère, mon ami
Doux frère, mon ami, lorsque je ne dors pas,
Mes yeux s'ouvrent comme des fleurs sur ta tombe;
Si je ne puis manger mon pain,
Mon jeûne, comme un saule, pleure sur ta tombe;
Si je ne puis calmer ma soif, sous la chaleur,
Que pour toi elle se charge en source, pauvre voyageur.
Où, dans quel pays noir et désolé,
Gît ton pauvre corps, perdu et mort ?
Dans quel paysage dévasté
Ta malheureuse âme va-t-elle errer ?
Viens; que mon effort soit ton repos…
Enfouis ta tête dans mes peines,
Ou plutôt
Prends ma vie et mon sang,
Pour t'acheter un meilleur lit;
Ou prends mon souffle et prends ma mort
Pour t'acheter un meilleur sort.
Lorsque les guerriers seront morts,
Et les drapeaux en poussière,
Ta croix et la mienne diront encore
Que le Christ, sur chacune, est mort pour nous deux,
Car le Christ, dans le naufrage de ta jeunesse, a sombré
Et dans les ruines de mon printemps a pleuré:
Le prix de Ses larmes, tombant dans ta main faible et solitaire,
Te ramènera dans ta terre
Le silence de Ses larmes sonnera
Comme des cloches sur ta tombe étrangère;
Entends-les et reviens; elles t'appellent comme une mère.
de Thomas MERTON dans " La nuit privée d'étoiles".
10:55 Publié dans Poètes du monde entier | Lien permanent | Commentaires (4)
Commentaires
C'est un très beau poème plein de sensibilité, de nostalgie et d'espérance pour les croyants.Il pourrait s'adresser à tous ces soldats morts et enterrés loin de chez eux. En cette fête de la Toussaint il est vraiment de circonstance. Toutes mes félicitations à l'auteur.
Écrit par : Virginie | lundi, 30 octobre 2006
Merci Virginie.
Écrit par : Gaudeamus | dimanche, 05 novembre 2006
triste et beau ce poème et il me fait hélas penser à quelqu'un.
la mort n'est peut-etre pas aussi tragique que ça.
Écrit par : YOUPETTE | mercredi, 22 novembre 2006
Sais-je si le plaisir de vivre n'est pas une tromperie ?Si la mort ne ressemble pas à un jeune homme qui a quitté de bonne heure son pays natal et qui n'y retournera plus ?
TCHOUANG TSCHEOU
Merci Youpette de ton passage sur mon blog.
Écrit par : Gaudeamus | samedi, 25 novembre 2006
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